Le salon de coiffure chinois
Pour une coupe de cheveux, à peine entrés dans le salon de coiffure, on nous tend une liste de prix avec 3 colonnes :
1ère colonne => coupe effectuée par un débutant = prix bas
2ème colonne => coupe effectuée par je ne sais qui = prix moyen
3ème colonne => coupe effectuée par le grand manager, le Dieu du ciseaux = prix plus élevé.
On doit donc vite faire un choix : j’économise et je ressors moche ou je dépense et je ressors peut-être quand même moche, sauf si j'ai un gros coup de bol ? Chacun choisira en fonction des valeurs qui lui sont propres.
Mon mari par exemple choisit le débutant pour ses enfants chéris et se garde le grand manager pour lui-même. On a fini par faire une thérapie familiale avec mon fils ainé parce qu’il ne comprenait pas le choix de son père.
Puis, on passe au bac à shampoing.
A Shanghai, on se fait laver les cheveux couché. Comme dans un lit. Le rituel ne varie pas d’une virgule dans les 4 salons chinois que j’ai testés.
En général, la personne à qui je vais confier le lavage de mon cuir chevelu est âgée de 11 ans.
En Chine, ils font tous très jeunes d’apparence. Impossible de deviner l’âge de leurs artères. Mais moi j’ai décidé qu’ils avaient 11 ans (avec une marge d’erreur de plus ou moins 8 ans)
Je regarde donc le très jeune homme dans les yeux et je lui dis « tout doucement le lavage, ok ? » Et comme d’habitude depuis 14 mois, il me répond : « OK, no problem ! »
La séance commence : on plante des trucs qui ressemblent à des fourchettes dans le cuir cheveu. Au début, on sursaute. Après, on réalise que ce sont juste les 10 doigts de cet adolescent pré-pubère.
Le lavage à proprement parlé démarre. Ca décape. Un lavage énergique ou tonique diront les hommes forts et virils. Moi, en grande chochotte, je ne dirais pas ça comme ça. Je dirais simplement que j’ai envie de pleurer comme un bébé.
Les gestes sont identiques chez tous les coiffeurs. On dirait qu’ils ont été formés selon une même technique de lavage.
Ce moment dure une plombe. Je lui montre que ça fait mal par diverses grimaces. Rien n’y fait. L’ado se déchaine. Il me propose de terminer par un massage du cuir chevelu.
Comme à mon habitude, je lui réponds : « même pas dans tes rêves » et en jeune femme très bien élevée, je finis par lui dire plein de gros mots (mais uniquement dans ma tête parce que c’est un enfant.)
Et puis, soudainement, je me rappelle qu’il faut aller vers l’autre, essayer de comprendre la différence, appréhender son monde à lui pour enrichir le mien… La vache, cette dernière phrase est tellement belle que j’ai eu envie de la mettre en gras.
C’est ainsi qu’une année après mon arrivée, je me retrouve à faire des recherches à la noix sur Google pendant des heures pour comprendre pourquoi diable un Chinois ça ne lave pas les cheveux comme un Suisse.
Peut-être me planté-je mais je crois deviner que c’est une histoire de barrage qu’il faut lever pour laisser couler l’énergie, le fameux Qi, (prononcez « tchi ») qui circule dans notre corps. Un adage chinois dit : "la stagnation du Qi et du sang engendre les maladies alors que le circulation fluide et régulière les guérit".
En gros avec son lavage à la Rambo, il m’ouvre les chakras et il essaie peut-être juste d’être sympa le gamin.
Si un coiffeur chinois tombe sur mon post peut-être pourra-t-il m’éclairer sur le sujet….car c’est bien connu, les coiffeurs chinois écument souvent les blogs en français durant leur temps libre.